Votre SRL achète un bâtiment : avec droits d’enregistrement ou TVA ?

Vous envisagez d’acheter un bâtiment par l’intermédiaire de votre société.

Votre SRL achète un bâtiment : avec droits d’enregistrement ou TVA ?

Vous envisagez d’acheter un bâtiment par l’intermédiaire de votre société. Normalement, elle devrait alors payer des droits d’enregistrement, mais les bâtiments neufs sont généralement vendus avec TVA. Quelle est la solution la plus économique ?

       I.            Acheter un bâtiment avec les droits d’enregistrement

Votre société paie des droits d’enregistrement si l’immeuble n’est pas vendu avec TVA. En revanche, si un immeuble est vendu avec TVA, la vente est exonérée des droits d’enregistrement proportionnels, et seul le droit fixe de 50 € doit être acquitté (art. 159, 8° C. enr.) .

Normalement, c’est le taux du droit de vente général qui s’applique, soit 12,5 % pour l’achat d’un immeuble situé en Wallonie ou à Bruxelles, et 12 % pour l’achat d’un immeuble en Flandre. Votre société ne peut pas bénéficier des taux réduits ni des mesures de faveur applicables aux achats de maisons familiales, pour lesquels l’acheteur doit être une personne physique.

Les droits d’enregistrement ne sont pas récupérables et sont donc comptabilisés comme des frais. Ils sont déductibles aux mêmes conditions que les amortissements et autres frais de construction, c.-à-d. si vous prouvez que votre société les a exposés pour obtenir ou conserver des revenus imposables. Les droits d’enregistrement doivent être activés en tant que frais d’achat complémentaires, mais si votre société est considérée comme «petite», elle n’est pas obligée de les amortir en même temps que le bâtiment et peut également choisir de les déduire en une seule fois, lors de l’exercice comptable de l’achat (art. 196, §4, al. 1er CIR 92) .

Un immeuble que votre société achète avec des droits d’enregistrement aura normalement déjà été occupé auparavant. Par conséquent, votre société n’aura en principe pas droit à la DPI : ni à la DPI ordinaire de 8 % (pour 2023) pour l’immeuble lui-même, ni à la DPI spéciale de p.ex. 27,5 % (pour 2023) pour les investissements de sécurisation du bâtiment.

    II.            Acheter un immeuble avec TVA

Pour que votre société paie la TVA, il faut que deux conditions soient remplies. Premièrement, il doit s’agir d’un immeuble considéré comme «neuf» sur le plan de la TVA. C’est le cas jusqu’au 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de la première occupation ou utilisation de l’immeuble (art. 8, §1er CTVA) . En 2023, seuls les immeubles dont la première occupation a eu lieu au plus tôt le 1er  janvier 2021 peuvent donc être vendus avec TVA. Ensuite, le vendeur doit être soit un «constructeur professionnel», c.-à-d. une entreprise cédant régulièrement et à titre onéreux des (parties de) bâtiments neufs qu’elle a construits ou fait construire ou qu’elle a acquis moyennant paiement de la TVA, soit un vendeur (qui peut éventuellement être un particulier) ayant opté pour une vente avec TVA (art. 8 CTVA) .

En principe, votre société paie le taux normal de 21 %. Un taux moins élevé n’est pas possible pour l’achat d’un immeuble neuf.

La récupération de la TVA payée par votre société sur l’achat de l’immeuble dépend de l’usage qu’elle fait de ce dernier. On distingue alors trois hypothèses. La première est que votre société utilise elle-même l’immeuble pour une activité soumise à la TVA, p.ex. comme bureau, surface commerciale, entrepôt, etc. En principe, elle peut alors récupérer intégralement la TVA. La deuxième possibilité est qu’elle loue le bâtiment, auquel cas elle ne peut normalement pas récupérer la TVA, car la location en est en principe exonérée. Il y a cependant des exceptions à ce principe. Il est ainsi possible d’opter pour la location d’un bâtiment neuf avec TVA, si le locataire utilise le bâtiment pour son activité économique. La troisième possibilité est que votre société mette gratuitement l’immeuble à votre disposition à titre privé, en tant que résidence, ou que l’activité de votre société ne soit pas soumise à la TVA. La TVA n’est alors pas récupérable.

D’un point de vue comptable, la TVA que votre société ne peut pas récupérer est une charge (comme les droits d’enregistrement), et ce sont dès lors les règles fiscales liées à la déductibilité des charges qui s’appliquent. La TVA non récupérable est donc normalement déductible en tant que frais professionnels, au même titre que les amortissements et les autres frais de l’immeuble. Concrètement, la TVA que votre société ne peut pas récupérer, parce qu’elle loue l’immeuble ou parce que son activité n’est pas soumise à la TVA, est en principe déductible en tant que charge professionnelle, tandis que la TVA qu’elle ne peut pas récupérer parce que vous habitez gratuitement l’immeuble n’est déductible que si vous pouvez convaincre l’administration fiscale que les conditions de la théorie de la rémunération (et/ou éventuellement de la théorie de la plus-value) sont remplies. Si la TVA est déductible en tant que frais professionnels, il en va de même pour les droits d’enregistrement. Il s’agit de frais complémentaires que les petites sociétés peuvent déduire en une fois ou amortir au même rythme que l’immeuble.

Un bâtiment considéré comme neuf sur le plan de la TVA ne l’est pas forcément en ce qui concerne la DPI. En effet, pour être considéré comme neuf pour la DPI, le bâtiment ne peut pas avoir déjà été occupé. N’oubliez pas non plus que, en cas de location, votre société n’a droit à la DPI que si le preneur remplit les conditions, critères et limites d’application de la DPI au moins au même taux, et ne cède pas lui-même le droit d’utilisation.

 III.            Comparaison

Supposons que votre SRL achète un immeuble pour 300 000 € hors droits d’enregistrement ou TVA. Nous comparons un achat avec droits d’enregistrement à un achat avec TVA, en supposant que votre SRL utilise la totalité du bâtiment pour une activité soumise à la TVA (éventuellement en le louant avec TVA), ou qu’elle n’en utilise que la moitié pour une activité TVA et loue l’autre moitié sans TVA. Nous supposons en outre que, dans le cas d’un achat avec droits d’enregistrement, le bâtiment n’est pas neuf pour la DPI, et que, dans le cas d’un achat avec TVA, il l’est, de sorte que la DPI (de 8 %) est possible. Par conséquent, dans ce deuxième cas, nous avons prévu comme sous-hypothèse (de l’hypothèse de la location) que l’immeuble est loué à une autre entrerpise qui aurait elle-même droit à la même DPI. Le taux réduit de l’impôt des sociétés (20 %) est applicable.

 

Achat avec droits d’enregistrement

Achat avec TVA

 

100 % activité TVA

50 % loué

100 % activité TVA

50 % loué à un particulier

50 % loué (sans TVA) à une entreprise

Valeur d’achat bâtiment

300 000,00

300 000,00

300 000,00

300 000,00

300 000,00

Droits d’enregistrement

36 000,00

36 000,00

 

 

 

TVA totale

 

 

63 000,00

63 000,00

63 000,00

TVA récupérable

 

 

63 000,00

31 500,00

31 500,00

Frais complémentaires

36 000,00

36 000,00

-

31 500,00

31 500,00

Prix d’acquisition brut

336 000,00

336 000,00

300 000,00

331 500,00

331 500,00

Déduction pour investissement

-

-

24 000,00

12 000,00

26 520,00

Impôt des sociétés

-67 200,00

-67 200,00

-64 800,00

-68 700,00

-71 604,00

Prix d’acquisition net

268 800,00

268 800,00

235 200,00

262 800,00

259 896,00

Dans cet exemple, le prix d’acquisition net est plus bas si votre SRL achète avec TVA un bâtiment considéré comme neuf tant pour la TVA que pour les impôts directs, et qui sera entièrement utilisé pour une activité TVA. En effet, elle peut alors récupérer intégralement la TVA, tout en ayant droit à la DPI. Discutez avec votre gestionnaire de dossiers afin de trouver la meilleure solution dans votre cas.